Jazz Turner, 26 ans, navigue seule autour des îles britanniques malgré une maladie incurable. Diagnostiquée avec une forme terminale du syndrome d’Ehlers-Danlos, une maladie génétique rare qui affecte les tissus conjonctifs, Jazz vit avec de nombreuses limitations physiques, notamment l’usage permanent d’un fauteuil roulant. Plutôt que de céder à la résignation, elle a décidé de se lancer dans un défi hors du commun : effectuer un tour complet du Royaume-Uni en solitaire, sans escale et sans assistance.
I don’t want to die in a hospice; instead I’ve chosen to sail and chase my dreams.
— Je ne veux pas mourir dans un hospice ; j’ai choisi plutôt de naviguer et de poursuivre mes rêves.

Elle est partie de Brighton Marina le 2 juin 2025, à bord de son voilier de huit mètres baptisé Fear, un Albin Vega spécialement adapté à ses besoins. Le nom de son bateau n’est pas anodin : il représente l’acronyme de son mantra personnel, “Face Everything And Rise”. Son itinéraire couvre environ 2 070 milles nautiques, une traversée qui devrait durer entre quatre et huit semaines selon les conditions. Ce voyage n’a pas pour seul but la performance ; c’est un acte de revendication, une démonstration de résilience et un appel à changer notre regard sur le handicap.
Passionnée de voile depuis l’âge de 13 ans, Jazz a construit son premier dériveur à 14 ans et s’est ensuite tournée vers l’ingénierie mécanique. Malgré sa maladie, elle a représenté la Grande-Bretagne dans des compétitions internationales de voile para-inclusive, où elle a remporté des médailles. Sa passion pour la mer est aussi un moyen de conserver sa liberté, même quand son corps la limite. Naviguer en solitaire avec des douleurs constantes, des pertes de connaissance imprévisibles et une mobilité réduite pourrait sembler impossible. Et pourtant, elle y parvient.
Le bateau Fear a été rigoureusement préparé. Il est équipé de panneaux solaires, d’éoliennes, de systèmes d’alerte, d’une station météo embarquée, de moyens de communication d’urgence, et d’un cockpit entièrement adapté à sa condition. Grâce à North Sails, elle dispose aussi de voiles conçues sur mesure pour un usage plus fluide et sécurisé, fabriquées avec des matériaux durables dans le cadre de leur programme RENEW.
When I started this journey, Project Fear was nothing more than something to keep me going. It’s grown into something far larger than myself.
— Quand j’ai commencé cette aventure, Project Fear n’était rien de plus qu’un moyen de me maintenir en vie. C’est devenu quelque chose de bien plus grand que moi.
Au-delà du défi physique, Jazz a aussi une mission philanthropique. Elle souhaite récolter des fonds pour Newhaven & Seaford Sailability, une organisation qui permet aux personnes en situation de handicap de découvrir la voile. Son objectif initial était de réunir 30 000 £, mais sa campagne a largement dépassé ce chiffre, atteignant près de 60 000 £. Ces fonds serviront à acheter des bateaux adaptés, notamment des Hansa, ainsi que des systèmes de navigation accessibles via commandes oculaires ou par souffle, afin d’ouvrir la mer à d’autres marins comme elle.
Le parcours de Jazz est suivi avec admiration par les médias britanniques. BBC News et le Sussex Express relatent son départ, ses escales, les aléas de la météo et sa détermination sans faille. Dans une mer parfois capricieuse, avec peu de vent et de longues heures de dérive, elle garde le cap, animée par l’idée que la vie mérite d’être vécue à fond, même — et surtout — quand le temps semble compté.
Jazz Turner ne navigue pas seulement contre les vagues. Elle navigue contre les idées reçues, contre l’exclusion, contre la peur. Elle prouve que la mer, tout comme la vie, appartient à ceux qui osent y croire.
Site de Project FEAR